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France Gall de A à Z

Les photos

L’article

Elle qui se livre rarement, a accepté pour OK ! de répondre en toute franchise.

France Gall se livre généralement par bribes. Elle reconnait ne pas trop aimer les interviews. Mais pour OK ! elle a accepté d’ouvrir son coeur de A à Z, abordant tous les sujets, son métier, son adolescence, ses passions, ses enfants … Un document rare qu’elle nous offre juste pour nous. A déguster comme un mets fin.

A comme Action-Ecole et Afrique

Travailler pour Action-Ecole c’est ce que ï ai fait pendant ces deux dernières années. Cela faisait partie de mes préoccupations depuis longtemps et cette opération est arrivée à pic parce que c · était une façon plus sûre de s’occuper du problème de la famine qu’avec c les grands,. Action-Ecole ça se fait avec les enfants et c’est ce qui m’a vraiment convaincue. Le but principal n’est pas seulement d’envoyer de la nourriture en Afrique, encore que des choses extraordinaires aient été faites dans ce domaine, mais c’est surtout de faire prendre conscience aux jeunes de ce qu’il se passe puisqu’ils vont hériter de ce monde. Quand j’étais écolière, j’étais déjà troublée par les injustices dans le monde, parce que ça n’existe pas que depuis deux ans mais on en parlait moins et je ne savais pas comment agir. Je suis sûre que j’aurais adoré participer à une opération comme celle-ci. C’est vraiment une grande réussite.

A comme Adolescence

Je n’ai pas eu d’adolescence et il fallait être fichtrement équilibrée pour passer sans transition de la petite adolescence à une vie adulte. J’ai enregistré mon premier disque à 15 ans et demi et j’étais très très bébé à l’époque. Sur le moment, c’était vraiment très dur. Entre 16 et 20 ans ça a été la période la plus difficile de ma vie. Je travaillais beaucoup, je n’avais pas du tout la vie de tout le monde, pas de vacances, pas d’amis, pas de rapports simples avec les gens. Mais je me suis rattrapée après puisqu’entre 21 et 24 ans j’ai vécu à la campagne où les choses de la terre m’ont un peu ramenée à des valeurs plus essentielles.

B comme Babou

Ce sont mes parents qui m’ont très vite appelée ainsi. C’est le diminutif d’Isabelle, mon vrai prénom. Et c’est ce qui me reste de mon enfance avec l’équilibre que j’ai dans la vie qui me vient de mon éducation et de l’amour dans lequel j’ai été élevée. Babou, c’est tout ça et je suis toujours émue quand ma famille m’appelle comme ça. J’ai l’impression d’être encore une petite fille. Ça me rappelle des tas de souvenirs, quand ma mère m’envoyait faire les courses et que lés commerçants m’interpellaient en m’appelant Babou.

B comme la Bêtise

La Bêtise humaine, je crois que malheureusement on ne peut pas lutter contre, il n’y a rien à faire et c’est peut-être le pire des fléaux. J’ai participé récemment à un concert pour Action-Ecole et il y a eu des tas d’enfants qui n’ont pas pu venir parce que leurs professeurs étaient contre. Ça, pour moi, c’est la vraie bêtise. Mais je ne peux pas m’arrêter à ça. Je n’en tiens pas compte et j’avance quand même.

C comme Corps

Je crois que quand on est bien dans son corps, ça aide à être mieux ou bien dans sa tête. C’est important de s’occuper de son corps. Bien sûr, il faut de la volonté parce que ça n’est pas très rigolo de faire de la gym. Mais quand on s’occupe de son corps, qu’on se trouve donc plus belle, ça rend plus sûre de soi, ça nous donne de l’énergie. Mais je dois bien avouer que je n’ai pas beaucoup le temps de penser à moi.

E comme Enfants

C’est ce qui compte le plus pour moi. C’est la chose la plus importante de ma vie même si je suis très fière de la façon dont j’ai réussi mon métier, des rapports que j’entretiens avec les gens qui me suivent. Mais si je devais arrêter de chanter pour une raison ou pour une autre, je le ferais pour mes enfants, je n’ai jamais conçu la vie sans enfants et déjà vers 18 ans je rêvais d’en avoir.

E comme Emotion

C’est ce que j’aime le plus dans les spectacles. Cette émotion qui passe de part et d’autre, de la scène et de la salle et qui se rencontre. Je trouve que c’est quelque chose qu’on ne peut pas nous enlever. Je n’ai pas besoin d’être très émue pour pleurer, il me suffit d’un rien dans la joie comme dans la tristesse.

F comme France

Il y a des tas de qualités en France. Du nord au sud c’est extrêmement varié et l’été, ça nous arrive souvent de louer une maison dans une région différente de la France pour découvrir des paysages nouveaux et on pourrait le faire pendant vingt-cinq ans sans jamais retrouver la même chose. Avec je dois le dire une petite préférence de ma part pour le sud, j’aime dès que les maisons sont un peu roses, qu’il y a des places de villages où on joue à la pétanque, les marchés, le soleil plus fréquent … Et puis c’est le pays où l’on mange le mieux au monde et comme les repas sont très importants pour moi, je peux dire que j’ai beaucoup de chance de vivre ici ! Mais en même temps, je trouve que la France a des côtés insupportables. Il y a un esprit français qui me déplaît. Le côté un peu chauvin et mal élevé à l’étranger. Et puis les gens un peu grognons qui ne savent plus sourire spontanément. C’est un pays où on a honte de gagner de l’argent, où on n’aime pas ceux qui réussissent. C’est un pays qui vous freine. Si je débutais aujourd’hui ma carrière, je partirais ailleurs. Si je n’avais pas ma famille, mes enfants, c’est évident, j’irais vivre aux Etats-Unis. c· est un pays impitoyable et très dur mais en même temps on vous pousse, on vous encourage à faire des choses. Ici dès que quelqu’un réussit, dans n’importe quel domaine, il va être regardé d’un drôle d’œil, on va trouver ça suspect, les rumeurs vont aller bon train … Et ça c’est insupportable.

G comme Garçon

J’aime bien être habillée comme un garçon, tout en restant très féminine. J’ai toujours aimé les grands pulls, les grandes chemises … Pour chanter je ne pourrais jamais mettre une tenue très féminine et pourtant je trouve ça très joli, les robes fourreaux, les bras nus mais ça n’est pas pour moi. Je me sens beaucoup mieux avec une veste d’homme, une chemise d’homme, une cravate …

H comme Humour

J’aime beaucoup rire et c’est fou ce que j’aime les gens qui me font rire ! Je crois que, quand on a de l’humour, on se sort de toutes les situations. Si on se voit avec un peu de recul, pratiquement toutes les situations compliquées peuvent devenir dérisoires. Je pense que mes enfants n’en manqueront pas parce que je suis une mère qui les amuse beaucoup. Je fais parfois des choses qui les étonnent, je fais le clown mais je sais que lorsqu’ils s’en souviendront ça les fera rire. L’humour ne rend peut-être pas la vie plus belle mais cela la rend moins sordide. Le seul moment où je manque totalement d’humour c· est quand j’ai vraiment le trac.

I comme Interview

Autant j’adore parler dans la vie, autant je déteste lorsque ça passe à travers un micro. Moi, moi, moi je, je, je, ça n’est pas ce que j’aime. J’aime bien parler avec des gens, les interviewer à mon tour pour les connaître, pour entrer dans leur univers. Mais il ne s’agit pas forcément de gens connus. Des tas de gens différents ont des histoires tout à fait passionnantes à raconter.

I comme Inspiration

J’ai essayé une fois d”écrire une chanson mais je ne suis jamais parvenue à la finir. Ça ne suttit pas d’avoir une idée. Avant un album, on en parle un peu avec Michel mais il travaille seul. Je ne lui ai pas demandé par exemple d’écrire une chanson sur “Babacar” mais quand je suis rentrée, je lui ai raconté mon histoire avec ce bébé et ï ai été très étonnée qu’il en fasse une chanson quatre mois après.

J comme Jeu

J’ai la passion des jeux. J’adore jouer surtout aux cartes, au poker, à la canasta … J’adore passer des soirées à jouer jusqu’à quatre heures du matin. C’est drôle, beaucoup plus drôle que de regarder la télévision.

J comme Journal

J’en ai écrit un pendant huit ans, et puis j’ai arrêté une dizaine d’années. Il se trouve que j’ai recommencé à la mort de Daniel (Balavoine) parce que je ne voulais pas raconter ma vie au jour le jour, mais plutôt des faits, des émotions que j’ai partagés avec des gens formidables que j’ai eu l’occasion de rencontrer à la mort de Daniel, de celle de Coluche, j’ai réalisé que j’avais oublié des tas de choses, ce qu’on s’était dit, comment les choses s’étaient passées entre nous. Je fais ce journal pour me souvenir des moments forts de ma vie. J’y colle des photos et je le relis parfois, c’est émouvant.

L comme Livres

Il n’y a pas de plus grand plaisir que de lire un livre qui vous plaît et d’être complètement transporté dans un univers. Quand je finis un livre, ça me poursuit pendant des jours et des jours, je m’identifie aux personnages, à l’histoire. Si c’est drôle, ça me donne la pêche, si c’est triste, c’est affreux. Je pleure en lisant et en y repensant. Quand j’aime un livre, je l’offre ou je le conseille à ceux que j’aime et j’adore qu’on m’en offre surtout si la personne qui me le donne m’y a écrit une petite dédicace.

M comme Métier

Je n’ai pas tellement eu à réfléchir pour savoir ce que je ferais comme métier parce que ça a coulé de source. Dans ma famille tout le monde est musicien, mes grands-parents, mon père … A douze ans je me disais que je serais actrice parce que je voulais faire quelque chose qui ne soit pas conventionnel. On était dans une famille avec peu d’argent et j’avais envie d’aller dans de beaux hôtels, de m’acheter plein d’affaires, de ne pas avoir la vie de tout le monde. La musique c’était naturel, j’étais toujours première en chant, je chantais tout le temps mais c’est surtout mon entourage, mon père qui ont décidé pour moi. Mon premier disque a marché tout de suite. Ça a été très facile, très simple et j’ai été lancée du jour au lendemain. A un moment, à 21 ans quand je me suis arrêtée, j’ai vraiment cherché ce que je pourrais faire d’autre mais c’est très difficile parce que c’est le métier le plus extraordinaire que je connaisse. Je ne connais pas un seul métier où on soit autant en contact avec les gens et où il y a un tel échange et ça, c’est fantastique.

N comme Nostalgie

J’ai la nostalgie du bien vivre, du temps passé, de la place perdue dans les appartements. Il n’y a plus de choses inutiles et je le regrette. Pour la cuisine c’est pareil, on achète tout en boite … J’ai la nostalgie des bonnes choses du temps passé. En revanche la science-fiction ne me touche pas du tout. Plutôt que d’aller sur la lune, je trouve qu’on ferait mieux d’utiliser l’argent pour régler le problème du cancer, des maladies infanliles. ou de la faim dans le monde.

N comme Notoriété

Je l’ai voulue puisque j’ai choisi ce métier mais en même temps je voudrais redevenir anonyme quand je ne chante pas. Je voudrais pouvoir vivre comme tout le monde car à cause de ma notoriété il y a beaucoup de choses que je ne fais pas. Je suis très angoissée par la foule ou à l’idée de rentrer dans un café seule. Si j’étais inconnue, j’aimerais bien que les gens me regardent mais là ça me gêne tellement. Mais en même temps c’est extraordinaire quand les gens viennent vous dire un mot gentil, quand ils vous font un petit signe en voiture. D’ailleurs, moi-même, je le fais très souvent. Si je me trouve par exemple dans le même restaurant que quelqu’un que j’admire et que je ne connais pas, je lui envoie un petit mot ou je vais lui dire que je l’aime.

O comme Organisation

Je suis la reine de l’organisation ! Comme j’ai un très grand sens du confort, je m’organise en ce sens. J’aime prévoir un taxi quand j’arrive de voyages par exemple, toutes ces petites choses qui rendent la vie plus facile. Je suis très prévoyante et je déteste donc être prise au dépourvu. Quand je pars en promenade avec mes enfants par exemple, j’emporte tout ce qu’il faut au cas où il pleuvrait, ou qu’ils aient chaud, faim, soif … je n’aime pas l’improvisation. Evidemment ça laisse peu de place à la surprise mais tant pis …

P comme Photos

J’aime bien voir les photos mais je déteste poser. Et surtout ce dont j’ai horreur, c’est qu’on me prenne en photo sans me le demander. Ça me met complètement hors de moi et je suis même capable de me jeter sur la personne qui fait ça. Moi, si on me photographie sans mon accord, c’est comme si on entrait chez moi sans être invité.

P comme Pudeur

Je suis très pudique et ça doit être pour ça que je met toujours des choses qui me couvrent sur scène. Il me serait absolument impossible de m’habiller comme Cyndi Lauper par exemple même si, sur elle, ça me fait rire. Moi, je serais horriblement malheureuse et gênée de bouger. Je trouve ça déjà tellement incroyable d” être sur scène avec 5000 paires d”yeux qui vous regardent. C’est presque indécent, impudique en tout cas, alors si en plus je devais être presque nue …

Q comme Qualités

Les gens que je préfère sont ceux qui font attention aux autres et qui donnent. C’est fou ce que les gens peuvent être renfermés sur eux-mêmes, alors que plus on donne, plus on reçoit. Cette qualité-là, ça doit s’appeler la générosité du cœur ou bien l’amour des autres tout simplement. Je n’envie pas les qualités des autres mais parfois je regrette de ne pas avoir fait davantage d’études. En fait, je ne suis pas sûre de moi et parfois ça m’ennuie. En même temps, j’aime les gens fragiles surtout les artistes. J’aime les gens qui doutent, ceux qui se remettent en question pour avancer.

R comme Rêves

Je rêve énormément, toutes les nuits, des beaux, des rêves affreux. C’est merveilleux quand on se réveille d’un beau rêve. Mes rêves préférés c’est quand je fais du cheval sur la plage alors que dans la réalité c’est quelque chose qui me terrorise. Et puis c’est aussi quand j’entre par hasard dans un hangar rempli d’objets que j’aime à des prix vraiment dérisoires !

S comme Succès

C’est indispensable pour qu’un artiste soit épanoui. On ne peut pas faire ce métier sans être reconnu. Mais on ne peut pas en avoir tout le temps, c’est en dents de scie et les moments durs n’arrivent pas forcément quand on se sent le plus fort. J’ai eu la chance extraordinaire de retrouver le succès d’une façon plus intéressante puisque je refaisais mon métier comme j’en avais envie. Avant, ça ne marchait plus parce que je faisais des choses qui ne me plaisaient pas, donc que je défendais mal. Aujourd’hui je suis en parfait accord avec ce que je fais. J’enregistre une chanson parce que je l’aime, pas parce que je pense que ça va être un succès. Il se trouve que ça marche et tant mieux, mais ça n’est jamais calculé. Mais si ça s’arrêtait je sais que je le vivrais très mal

S comme Séduction

On ne fait pas ce métier sans vouloir séduire. Moi j’ai besoin de séduire parce que je veux qu’on m’aime. Mes critères de séduction ne sont pas les mêmes pour les hommes et les femmes. Un homme pour me séduire doit être drôle et surtout, surtout avoir du charme. A une femme, je demande la complicité, j’ai besoin qu’elle écoute, qu’elle soit attentive et aussi qu’elle ait de la fantaisie. Tout ce qu’on attend d’une amie. Mais en général, je prends facilement les gens comme ils sont avec leur personnalité, leurs défauts, leurs qualités.

T comme Téléphone

Je hais ça. Le téléphone qui sonne me rend dingue. A la maison ça n’arrête pas, et il m’est arrivé de le jeter contre le mur, tellement excédée. Le vrai repos pour moi, c’est quand je me trouve dans un endroit où personne ne m’appelle et où je n’appelle personne.

T comme Temps

Je cours toujours après le temps. Je n’ai plus le temps d’aller au cinéma, de flâner dans les rues et quand je prends du bon temps, je culpabilise tout de suite. il y a ma carrière mais il y a aussi ma maison, mes enfants, Michel et finalement c’est en tournée que j’ai le plus de temps à moi. Parce qu’on s’occupe de moi, que tout est parfaitement organisé, que c’est un rythme régulier.

T comme Timidité

Je ne suis pas timide. Pourtant je rougis facilement Ce ne sont pas des gens, mais plutôt certains sujets qui m’intimident. Je crois qu’à partir du moment où on fait de la scène, on n’a plus peur de rien, plus peur des autres en tout cas.

U comme Uniformité

Je déteste les uniformes, l’uniformité.

V comme Voix

C’est mon cauchemar parce que j’ai la gorge très fragile et que j’ai tout le temps des problèmes. Quand je fais de la scène longtemps, il m’arrive d’être malade comme lors de mon dernier Zénith. A la cinquième chanson, plus aucun son ne sortait de ma bouche et je me suis mise à pleurer devant tout le monde. Entre deux sanglots, j’ai expliqué ce qu’il m’arrivait, c’est-à-dire la pire des choses pour une chanteuse. Les gens m’ont encouragée et j’ai pu terminer le spectacle mais c’est un souvenir terrible.

W: C’est comme au Scrabble, on retire la lettre.
X comme Xénophobie

Le racisme sous toutes ses formes est intolérable.

Z comme Zénith

J”attends ce moment, je trépigne avant ce grand rendez-vous. J’y serai à partir du 12 novembre 1987. J’ai fait de la scène à peine un an après avoir commencé à chanter. C’est un très, très mauvais souvenir. J’ai détesté ça. Pourtant je l’ai fait pendant cinq ans et je n’y ai jamais trouvé aucun plaisir. Quand j’ai décidé d’arrêter, ça a été un véritable soulagement. Quand il a fallu que je remonte à nouveau sur scène quelques années plus tard, ça n’a pas été simple mais je voulais savoir si j’étais passée à côté de quelque chose ou pas. Et j’ai connu enfin la vraie révélation à l’époque je recevais ce que je donnais, c’est-à-dire peu. Car j’étais très détachée de tout ça. J’ai débuté dans ce métier dans une inconscience totale. Je ne voulais rien savoir, je ne m’occupais de rien, ni de la vente des disques, ni de la pochette, ni de savoir s’il y aurait du monde dans la salle. Je n’ai commencé à faire ce métier et à l’aimer qu’en rencontrant Michel en 1974.

Véronick Dokan

Magazine : OK !
Date : 13 au 19 avril 1987
Numéro : 587

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