France
Avec France, paru en mars 1996, France Gall signe un album profondément personnel. Conçu après un séjour à Los Angeles, ce disque est né de son envie de faire vivre, seule, les chansons les plus fortes de Michel Berger. À partir d’un vaste répertoire, elle sélectionne treize titres, dont certains déjà présents sur scène à Pleyel, et cinq qu’elle n’avait encore jamais interprétés. Elle cherche à offrir un portrait large de la musique de Berger, pour la faire rayonner au-delà des frontières françaises. Entièrement produit par France Gall, l’album a été enregistré entre Paris, New York et Minneapolis. Pour la première fois, elle impose son timbre grave et naturel, là où Berger composait souvent trop haut pour sa voix. Le résultat donne un son singulier, mêlant soul, funk et modernité, où l’on retrouve aussi bien Débranche ! que Message personnel ou encore La Légende de Jimmy. Ce disque, qu’elle a porté seule de bout en bout, marque une évolution artistique profonde. Loin d’un best-of, France est un projet à la fois exigeant, intime et audacieux, salué à sa sortie pour sa force émotionnelle et son originalité
8e album studio
29 mars 1996
**Il faut noter que le titre Si, maman si, dans une version inédite, est disponible uniquement sur les éditions internationales de l’album France (Canada et Corée du Sud).
Le 27 mars 1996 paraît France, un album aussi intime qu’exigeant, pensé comme un hommage personnel à Michel Berger. C’est aussi, à bien des égards, l’œuvre la plus audacieuse et engagée de la chanteuse. Depuis sa série de concerts à la salle Pleyel en 1994, France Gall avait pris du recul. Avec ses deux enfants, elle part vivre quelques mois à Los Angeles, dans une maison autrefois habitée par Doris Day. C’est là, entre deux trajets pour l’école, que germe l’idée d’un nouvel album.
Elle décide de se replonger dans tout le répertoire de Michel Berger : ses propres chansons, celles qu’il a écrites pour elle, mais aussi pour d’autres, comme Johnny Hallyday ou Françoise Hardy. Le choix final se fixe sur treize titres. L’objectif est clair : donner un aperçu aussi large que possible du talent de Berger, et faire rayonner sa musique à l’international. Elle sait que c’était un rêve qu’il nourrissait.
Le disque alterne titres déjà interprétés par France Gall (Musique, Résiste, Message personnel…) et cinq morceaux inédits dans sa voix : La Légende de Jimmy, Lumière du jour, Privée d’amour, Que l’amour est bizarre et À quoi il sert. Certains titres, comme Si, maman, si dans sa version inédite, ne figurent que sur les éditions internationales de l’album, notamment au Canada et en Corée du Sud.
L’album a nécessité un travail de longue haleine. Après un mois entier consacré au choix des chansons, viennent deux mois de préproduction, puis l’enregistrement, d’abord à Paris. Insatisfaite du mix initial, France Gall décide de tout reprendre à New York. Elle s’entoure de producteurs chevronnés, dont le bassiste Marcus Miller, et multiplie les sessions entre les Record Plant Studios et Paisley Park, le studio de Prince. Elle doit faire coexister plusieurs équipes de musiciens, différentes méthodes de travail, sans jamais perdre la cohérence du projet. Un véritable défi, qu’elle résume d’une phrase : “C’était une bataille constante, mais au bout du compte j’ai obtenu un son unique.”
Pour la première fois, France Gall impose sa tessiture vocale naturelle. Là où Michel composait souvent dans des tonalités trop hautes, elle choisit ici de chanter plus grave, plus ancrée. Ce timbre, qu’on devinait parfois dans certains titres des années 60, prend ici toute sa place, au service d’arrangements modernes, teintés de soul, de funk et d’influences hip-hop.
Cette évolution ne passe pas inaperçue. La critique salue l’album. Dans Elle, Olivia de Lamberterie parle d’un disque “épuré, émouvant, qui balance entre le rire et les larmes”. France Gall y apparaît seule, mais forte. Elle a pris le contrôle de chaque étape, porté ce projet de bout en bout. Pour elle, France n’est pas un best-of, mais bien une nouvelle façon de faire entendre Berger.
Un temps, France Gall envisage de faire exister ce disque aux États-Unis. Elle contacte le parolier Tim Rice pour adapter certains textes, mais se heurte à la complexité de l’exercice : « J’ai dû faire un ou deux “scratches” vocaux, ça m’a découragée », confie-t-elle. Un écho lointain à 1977, lorsque Musique avait failli devenir Music…
Malgré cela, l’album rencontre un beau succès en France, avec plus de 300 000 exemplaires vendus. France restera le dernier album studio de France Gall. Un adieu pudique et fort, tout en maîtrise, à l’homme et à l’artiste avec qui elle aura partagé bien plus que la musique.